Le travail que j’envisage de présenter repose sur deux constantes, épines dorsales de mon projet : Mémoire et éternité.
Dans mon adolescence, j’ai été confronté à une carrière de calcaire proche d’un petit village de l’Yonne et à un château en ruine perdu au fond d’une forêt de conte. Des traces profondes de ces confrontations restèrent longtemps figées dans ma mémoire. Elles finiront par pousser mes instincts bien plus tard à me projeter lors d’escapades photographiques dans de vastes territoires imprégnés d’une substance minérale abondante et omniprésente exploitée depuis l’aube de l’humanité, mais aussi à m’immerger dans l’intimité de certains lieux porteurs de précarité, d’âme et d’irréalités potentielles imaginatives.
La matière minérale dans les deux cas s’avère être le meilleur témoin permettant de conjuguer mémoire et éternité. Elle façonne continuellement au cours des âges de multiples formes variées, restructure, remodèle indéfiniment les paysages et les lieux de mémoire.
30 ans de photographie passée autour du minéral n’ont pas encore épuisé une irrésistible attirance envers ce constituant idéal brassé depuis l’origine du monde à aujourd’hui, cette prépondérante conquête du regard dans les plis du temps, ni découragé les perpétuelles interrogations de la matière et de ses propriétés visibles et invisibles, ce rapport ambigu entre fragilité et permanence, cette relation à l’éternité et à la mémoire.
Continuité, fragilité, immortalité des pierres résument des étendues, condensent la durée dans le temps et la mémoire, supports d’extase, de romantisme exacerbé, on les contemple, on s’y aventure, on s’y égare loin de l’univers humain actuel.
Se promener dans certains paysages nous rend visionnaire regardant le monde du haut d’un piédestal céleste, comme extrait de sa matérialité contemporaine, façonne le besoin d’un recul indispensable, d’une distance d’une toute autre dimension, n’est-ce pas rompre les amarres avec ce continent qui nous a vus naître ?
Disparaître ? « Le tragique est dans la nature, il précède l’arrivée de l’homme, il se poursuivra sans lui »
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